Le 22 mars 2018, j’ai participé à la mobilisation pour les cheminots en grève aux côtés de quelques employées de l’entreprise de nettoyage ONET, firme responsable de la propreté des gares d’île-de-France. Asta, Abi, Bamiraki et Awa y travaillent depuis près de 20 ans, parfois davantage, et sont sont elles-mêmes d’anciennes primo-grévistes. En novembre 2017 et pendant 45 jours, elles avaient tenu, parmi une centaine d’autres salarié.e.s dont Oumou Gueye et Fernande Bagou (responsables syndicales), des piquets de grève dans les gares alentour afin de protester contre la clause de mobilité imposée, sans discussion, par ce sous-traitant de la SNCF. Ce jour-là, nous avons déjeuné ensemble avant que la mobilisation ne démarre. Les voir marcher aux côtés de manifestants aguerris, l’énergie au coeur, à perdre une journée de salaire avec leurs genoux fragilisés par leur métier, m’a rendu fière de les rencontrer.
« Ma soeur, quand on a commencé la grève, les cheminots de SUD rail sont venus soutenir nos droits. C’était une bonne chose. Ils ont donné des conseils pour nous. Si quelqu’un fait de bonnes choses pour toi, et même si on est pas africain pareil, alors une fois qu’ils ont des problèmes, il faut les aider jusqu’au bout. »
« Le mois que nous n’avons pas travaillé, on a pu payer notre loyer et nourrir nos enfants. Ils nous ont permis de gagner de l’argent, grâce à la caisse de grève. On le sait qu’ils ont un bon coeur. Nous aussi, aujourd’hui, on doit être debout, pour leur donner notre force. »
« Plus de cent personnes ont fait grève. Mais ONET, ils sont trop durs. Ils voulaient changer nos contrats, alors qu’on ne sait pas toujours lire et écrire. Mais on connaît nos droits. Ça fait presque 30 ans que je travaille, je connais mes droits. Personne ne travaille gratuitement. »
« Moi ça fait 3 ans que je travaille sur cette gare », dit l’une. « Je travaille à la gare depuis bientôt 24 ans », en ajoute une autre.. « Moi, ça fait 19 ans. »
« ONET n’a encore rien respecté des accords engagés, après la grève. On est aussi pour ça : pour manifester encore pour nos droits. »
« Certains des salariés, pas beaucoup, n’ont toujours pas touché leur paie du mois de décembre. »
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Quelques temps plus tard avec un camarade, je rencontrerai Fernande Bagou, responsable syndicale. L’occasion de revenir sur leur grève. Son important témoignage est à lire sur ce lien.
« Les policiers ont été violents. Il y en a un qui m’a poussée, ils ont pris un collègue et lui ont tordu le bras — il n’a plus pu venir sur le piquet de grève pendant trois jours. On a peu parlé de cette brutalité, et pourtant c’était ça le plus dur pour nous. »